BernardPivot est un journaliste français, animant des émissions culturelles à la télévision. Biographie Il naît le 5 mai 1935 à Lyon, de parents épiciers. Durant la Seconde Guerre mondiale, son père est fait prisonnier, et sa mère se replie dans la maison familiale, à Quincié-en-Beaujolais, où Bernard Pivot va à l'école.
Journaliste chroniqueur, animateur et créateur d'Apostrophes, de LIRE, des Dicos d'or, grand défenseur des mots et de la langue française, auteur, président du Goncourt jusqu'en 2019, Bernard Pivot règne sur le monde des livres depuis des dizaines d'années. Sa notoriété et sa popularité sont inégalables dans le milieu. Il a publié plusieurs livres aux éditions Albin Michel,
Lécrivain et journaliste Bernard Pivot et Jean-François Piège étaient présents pour recevoir le 1er Prix des Ecrivains Gastronomes mis en place par le CML (Centre Méditerranéen de Littérature) et la Ville de Montélimar. Bernard Pivot a >>lire la suite . Culture. THUIR : Trois auteurs en lice pour le Prix Folire 2013. par admin le Nov 10, 2013 •
Jadis il était toujours pressé, il régnait sur le monde de la culture et il se sentait invincible. Aujourd'hui, à la retraite, c'est plus calme : les défaillances du corps, les anxiétés de
BernardPivot a préféré l’ordre alphabétique. Le premier livre qu’il a lu était un dictionnaire. Cela explique bien des choses. Mais qu’on ne s’y trompe pas : « Les mots de ma vie », ce n’est pas Bernard Pivot de A à Z. L’homme est trop pudique pour mettre son cœur totalement à nu. Il lève quelques coins du voile, c’est
Vay Tiền Trả Góp Theo Tháng Chỉ Cần Cmnd. Disons les choses d'emblée, je suis, l'auteur de cet article, le gendre de Bernard Pivot. Celui des deux qu'il a remercié, dans son livre Les Tweets sont des chats*, pour l'avoir initié aux maigres mystères des réseaux sociaux - l'autre, le kiné, a un rôle autrement plus précieux, qui soulage de ses mains les petits bobos d'un octogénaire dans la force de l'âge mais dont parfois, inévitablement, le corps grince. Les pages qui suivent ne dressent pas le portrait de l'animateur d'Apostrophes. C'est celui, subjectif, d'un homme qui, à l'époque de notre rencontre, au début des années 2000, avait décidé de prendre sa retraite en pleine gloire et de vivre, comme il le dit aujourd'hui, "une seconde vie, parce qu'à 65 ans, c'est encore possible, mais qu'à 75, c'est trop tard". D'un homme de 83 ans qui vit comme s'il en avait 30 et dont le rapport au temps qui passe me subjugue. Celui de "mon" Bernard Pivot - pour reprendre l'expression du responsable de cette rubrique dont l'enthousiasme a soutenu ce projet casse-gueule, malgré mes doutes et ceux, plus grands encore, du principal intéressé. Ou, plus exactement, de "notre" Bernard Pivot. Sans ses proches, amis, éditeurs, collaborateurs, jurés, pygmalions, observateurs avisés et lui-même, qui ont accepté de me livrer leur témoignage, l'exercice eut été vain, la photographie fragmentaire et sans grand intérêt. Qu'ils en soient ici remerciés. Episode 1 Où Bernard Pivot saute dans le vide, parce qu'à 65 ans tout est possibleSon histoire recommence donc en 2001. Cette année-là, malgré l'insistance de la patronne de France 2, Michèle Cotta, et d'une belle brochette d'intellectuels qui vont jusqu'à lui lancer un appel dans Le Journal du dimanche, Bernard Pivot décide unilatéralement de mettre un point final à Bouillon de culture, l'émission, hebdomadaire également, qui a succédé quelques années plus tôt à Apostrophes. La raison qu'il invoque est aussi lumineuse qu'anachronique dans un milieu, la télévision, où l'on ne lâche pas facilement son fauteuil Starck et la notoriété qui va avec, immense dans son cas "Je me suis dit, mon p'tit Bernard, si tu ne veux pas finir en professeur grincheux, il est temps de passer à autre chose." Offre limitée. 2 mois pour 1€ sans engagement Autre chose ? Ses fameuses dictées, qu'il poursuit jusqu'en 2005, et un peu de petit écran, une fois par mois seulement, avec une nouvelle émission sur une chaîne moins prestigieuse, où il rencontre des personnalités à la double appartenance culturelle et nationale. Double Je durera quatre ans. "Je posais toujours les mêmes questions, j'ai fini par me lasser." Bernard Pivot débordé par les photographes lors de la 500ème d'Apostrophes, sur Antenne 2, le 27 septembre PHOTO JOEL ROBINE / AFP PHOTO / JOEL ROBINESurtout, il passe de l'autre côté du miroir, où il ne s'est jusque-là aventuré qu'une fois, pour un roman de jeunesse, L'Amour en vogue, sur lequel il préfère ne pas s'étendre. Bernard Pivot se met à écrire. Des livres. "Une sorte d'espièglerie tardive", s'amuse-t-il. Trois ans de travail, tout de même, pour le premier, son Dictionnaire amoureux du vin. "Olivier Orban, le directeur de Plon, m'avait invité à déjeuner, se souvient-il. J'étais persuadé qu'il allait me proposer le football et j'étais décidé à refuser. Quand il m'a parlé du vin, j'ai été sidéré. J'ai pensé à mon enfance dans le Beaujolais, à Baudelaire. L'idée m'est apparue très bonne, j'ai dit oui". Bonne pioche, pour l'auteur et l'éditeur. Son hommage à Bacchus reste, à ce jour, le plus gros succès de la collection. Le pli est pris. Depuis, Pivot enchaîne Les Mots de ma vie, Oui, mais quelle est la question ? Au secours, les mots m'ont mangé, La mémoire n'en fait qu'à sa tête*... Coup de tonnerre chez les Goncourt. En 2004, le monde de la littérature lui réserve une nouvelle surprise. Et pas à lui seulement. Un coup de tonnerre ébranle les murs lambrissés de Drouant, le restaurant où le jury de l'académie Goncourt se réunit tous les premiers mardis du mois. Ses membres l'invitent à siéger avec eux, deux ans à peine après qu'il eut accepté de rejoindre le prix Interallié. Il s'assiéra devant le "premier couvert", où l'ont notamment précédé Alphonse Daudet, Colette, Jean Giono, Bernard Clavel, André Stil, mort en septembre. En octobre, Bernard Pivot est élu à sa place. Michel Houellebecq assailli par les journalistes après son prix Goncourt, en une première qui résonne en un siècle, jamais un non-écrivain n'avait été appelé à voter pour le plus grand des prix littéraires francophones. Plus fort, il s'agit d'un journaliste à la réputation d'incorruptible, qui devrait déranger le jeu de "combinazione" d'où sortent un peu trop souvent vainqueurs les mêmes, les pouliches de l'écurie "Galligrasseuil", ce tout-puissant trio composé de Gallimard, de Grasset et des éditions du Seuil. Incorruptible, vraiment ? L'anecdote est rapportée par Guillaume Allary, jeune directeur de la maison du même nom, qui a publié l'un de ses livres, Au secours ! les mots m'ont mangé*. Tous deux avaient pour ami l'éditeur Jean-Claude Lattès, disparu en janvier. "C'était deux super-potes, vraiment. Très, très proches. Pourtant, aucun auteur de Jean-Claude n'avait jamais été invité chez Pivot. Il a fini par lui demander pourquoi. La réponse de Bernard ? 'J'attends qu'un de tes livres me plaise'." Le président du Goncourt, entouré de la lauréate 2016, Leila Slimani à g., de Jerôme Ferrari et de deux membres du jury, Philippe Claudel et Patrick Rambaud de g. à d..AFPDonc, Pivot promet il ne s'est jamais laissé influencer à la télé, ce n'est pas pour commencer maintenant, Goncourt ou pas. De la transparence, la fin des arrangements, des jurés désormais irréprochables, les choses vont changer. Il mène la réforme, au pas de charge. En quelques mois, l'image s'éclaircit. Les Goncourt ont raté Gide, Camus, Céline, Yourcenar, Cohen, Sagan, Le Clézio ? En 2006, ils ne manquent pas Jonathan Littell et ses monumentales Bienveillantes. Puis couronnent Michel Houellebecq, le paria ; Marie NDiaye et Leïla Slimani, femmes et d'origine africaine ; même Pierre Lemaitre, auteur de polars à succès, une marque d'infamie jusque-là. Avec le virtuose Au revoir là-haut, en 2013, il signe l'une des plus belles ventes de l'histoire du prix. "C'est un type qui ne supporte pas qu'on bride sa liberté. Il a étendu cette exigence à l'ensemble du jury, se félicite Pierre Assouline, qui en est membre depuis 2012, bien après les premiers bouleversements. Jamais l'Académie n'a été si indépendante. Aucun juré n'est plus salarié par un éditeur. C'est Pivot qui l'a voulu." Profondément remaniés par les arrivées de Tahar Ben Jelloun, Philippe Claudel, Paule Constant, Patrick Rambaud, Régis Debray, auquel succédera la disruptive Virginie Despentes, en 2016, les Goncourt le remercient de les avoir brusqués, peut-être plus qu'ils ne l'avaient imaginé. En 2014, Pivot prend tout naturellement, comme une évidence, la place de la présidente Edmonde Charles-Roux, contrainte à la démission par la maladie. Les copains délaissés. Présider l'Académie, ça veut dire un peu de travail supplémentaire, de coordination, de représentation. Ses copains en sont bien conscients. Et sont plus réservés, eux qui comptaient remettre la main sur lui après les années Apostrophes, quand il lisait douze heures par jour, sept jours sur sept, dix mois par an. "Je pensais que lorsqu'il aurait arrêté la télé, nous nous verrions plus souvent et, comme lorsque nous étions plus jeunes, que nous retournerions aux matchs de L'Olympique Lyonnais LOL [son club de coeur], qu'il lèverait le pied, regrette mezza voce Paul Geoffray, l'un de ses vieux amis si chers de Quincié-en-Beaujolais, où la famille des Lyonnais Pivot s'était réfugiée pendant la guerre. Maintenant, il est le patron du Goncourt, il lit toujours beaucoup, il écrit beaucoup... Finalement, on le voit plutôt moins." Lever le pied ? Quand je lui demande s'il en serait capable, ma compagne, sa fille Cécile, avec laquelle il a écrit son dernier livre, Lire !, est catégorique "Ça me rappelle une discussion qu'on a eue, un jour, à propos de la vieillesse, sourit-elle. Il m'a dit qu'il ne fallait jamais rien lâcher, ni intellectuellement, ni physiquement, ni sexuellement. Mon père, renoncer à travailler ? Je serais terrorisée !" Jullienas Bernard Pivot, en est loin, le "globe-trotteur", comme l'appelle Paul Geoffray. La liste de ses activités après qu'il eut officiellement cessé d'en avoir a des allures d'inventaire à la Prévert outre ses livres, les tournées de promotion et l'Académie, il rédige chaque semaine deux colonnes pour Le Journal du dimanche, déjeune dès qu'il le peut avec le Club des Cent, une assemblée d'amateurs de bonne chère comme lui, où il côtoie Pierre Arditi, Alain Ducasse, Jean-Pierre Raffarin ou Claude Bébéar. Il se laisse enrôler par le comité de surveillance du groupe Express-Expansion, en 2005, et ça dure quelques années ; il prend le temps de créer un comité de défense du beaujolais, en 2009, et revient chaque saison y surveiller la mise en bouteilles de la cuvée qui porte son nom. Surtout, il se découvre deux nouvelles passions chronophages Twitter, donc, où le nombre de ses fans frôle désormais le million, et le théâtre, qui l'emmène sur les routes de France et d'Europe, qu'il vente ou qu'il pleuve. 3 ou 4 représentations par mois, plus de 200 depuis son premier spectacle, il y a six ans. Cécile "Je ne pourrais pas tenir à ce rythme." Paul "Les voyages forment la jeunesse, dit-on. Avec lui, c'est sûr !" Jean-Claude Jacquemet, un autre de ses copains de Quincié, admiratif "Je passe pour être en bonne forme, mais Bernard, c'est le gabarit au-dessus." Episode 2 Où l'on constate que marier travail et plaisir lui porte chance"Je voulais être journaliste sportif, pas littéraire. La télé, c'est elle qui m'a choisi. La direction de Lire, c'est Jean-Louis Servan-Schreiber qui me l'a proposée. Le concept des dictées a été inventé par un linguiste bruxellois. Sauf Double Je, les bonnes idées ne sont jamais venues de moi." Quand Bernard Pivot dit qu'il est un "veinard", qu'il jouit d'une "réussite qui dépasse ses qualités intellectuelles", ce n'est pas une coquetterie, il en est profondément persuadé. Sa fille aussi "Je ne connais personne qui ait eu autant de chance que lui dans la vie". Mais elle nuance "C'est aussi parce qu'il est bon et que c'est un gros bûcheur. Il a souffert pour décrocher son bac, souffert de ne pas avoir fait de longues études, de ne pas être allé à la fac, de ne pas parler d'égal à égal avec certains de ses invités d'Apostrophes, alors il a compensé en travaillant énormément." En d'autres termes, par lui-même "Quand vous vous retrouvez devant Marguerite Duras après de simples études de journalisme, vous ne jouez pas les fiers-à-bras, vous bossez." Jorge Semprun, l'un des seuls écrivains à avoir franchi les portes de son intimité, et dont la mort il y a sept ans l'a douloureusement affecté, retournait l'équation "Ta chance, lui disait-il, c'est de ne pas avoir fait l'université." La chance, elle s'apprivoise. C'est parce qu'il a de la chance que, à l'issue d'un entretien d'embauche désastreux, le rédacteur en chef du Figaro Littéraire apprend que ses parents sont lyonnais et produisent un peu de vin, et qu'il se laisse convaincre de le prendre à l'essai... contre une caisse de beaujolais que le jeune diplômé du Centre de formation des journalistes promet de lui rapporter la semaine suivante. Mais c'est parce qu'il est bon et qu' "il travaille énormément" pour combler ses lacunes en littérature qu'il le garde. C'est parce qu'il a de la chance que, mis à la porte du Figaro, il peut présenter sa première émission à la télé, Ouvrez les guillemets - et, accessoirement, régler avec ses indemnités de licenciement la facture de la piscine de sa maison de Quincié, qui porte, depuis, le nom de celui qui l'a viré, Jean d'Ormesson. Mais c'est parce qu'il est un intervieweur hors pair et qu'il marne comme un moine bénédictin que l'année suivante, en 1975, Apostrophes devient le phénomène que l'on sait... phénomène dont bénéficiera notamment "Jean d'O", devenu l'un de ses habitués. Coup de foudre au théâtre. C'est parce qu'il sent que Pivot sera bon devant les habitués de son théâtre du Rond-Point que, bien des années plus tard, au printemps 2012, Jean-Michel Ribes lui offre à son tour cette drôle de chance seul au milieu d'un décor minimaliste inspiré du plateau d'Apostrophes, table basse et fauteuil en cuir noir "extraits des réserves du Rond-Point, comme [il a lui-même] été extrait des réserves de la télévision française", Pivot lit ses Souvenirs d'un gratteur de têtes, depuis son enfance lyonnaise jusqu'au Nobel de Patrick Modiano, dont son imitation bégayante fait pleurer de rire le public. Pris de court, les journalistes sont rares. La salle fait le plein, trois soirs de suite. A en croire Jean-Michel Ribes - et pourquoi ne le croirait-on pas ? -, "Pivot s'est très vite pris au jeu, s'est libéré des caméras. Ça lui a redonné de la vie." Il ne le sait pas encore, mais il a chopé le virus. Il l'entretient en... travaillant énormément. L'éphémère dure. Il finit par écrire un nouveau texte, Au secours ! Les mots m'ont mangé*, fait appel à des régisseurs, à un metteur en scène, Jean-Paul Bazziconi, à un producteur, Jean-Luc Grandrie. Qui, lui aussi... "Journaliste, président de l'académie Goncourt, il se dit qu'il n'aurait jamais dû se retrouver là. Du coup, il travaille deux fois plus que les autres." Décidément. Cette chance-là serait donc devenue un travail comme un autre, fait de sueur et de labeur ? A la Pivot ? Bernard Pivot interviewé par Daniel Picouly, quelques minutes avant sa lecture d'Au secours, les mots m'ont mangé, sur la scène du Théâtre Comoedia, à Aubagne, le 15 novembre PROVENCE/MAXPPPJean-Michel Ribes préfère, de loin, parler plaisir, fraîcheur, transgression. "Il a toujours été comme ça, Pivot, un loup dans la bergerie, à côté de l'autoroute, ce culot, cette faconde, cette manière de dire 'j'aime le vin, le foot', son insolence. La scène a remis du charbon dans son moteur, l'a ramené à l'enfance, à cette vie qu'il a en lui, qu'il avait déjà. Il a trouvé un nouvel endroit où l'exprimer, le théâtre l'a 'débouché', comme on ouvre une bouteille, il a déchiré son manteau de solitude." Mazette ! On se dit, quand même, qu'il exagère. Puis on écoute ce qu'en pense François Busnel. L'animateur de l'une des dernières émissions littéraires du PAF, La Grande Librairie, ne cache pas ce qu'il doit au "plus grand journaliste français", à qui il a succédé dans le coeur des lecteurs téléspectateurs et, un temps, à la direction de Lire. La transgression ? "On ne mesure pas assez ce qu'il y avait de subversif à inviter, à une heure de grande écoute, sur la chaîne publique de Giscard d'Estaing, des auteurs interdits de séjour à la télévision par le pouvoir. Soljenitsyne en pleine guerre froide, il fallait oser." Le plaisir ? "Il est comme d'Ormesson, à qui je demandais pourquoi il faisait de la scène et qui me répondait 'Je m'amuse prodigieusement'." Avec ses mots à lui, moins fleuris, Pivot renchérit "Arrivé à un certain âge, on n'accepte plus que ce qui fait plaisir. J'ai décidé à 65 ans que le moment était venu." Ah bon ? Mais les signatures interminables dans les librairies, le mauvais vin aux apéros, les interviews creuses au micro de journalistes qui n'ont pas lu votre livre si, si, ça arrive, les longues heures de train pour aller jouer dans des salles des fêtes étouffantes ou glaciales ? Ces nécessaires contreparties - les "contraintes sociales" que lui imposent le Goncourt, le théâtre, ses éditeurs - sont autant de déclinaisons du plaisir. Et je comprends là qu'on en goûte d'autant plus le sel qu'on a passé, comme lui, quinze ans en tête à tête avec des livres et des écrivains, jours fériés et vacances compris. Il donne un exemple "Pendant les années Apostrophes, je ne suis pratiquement pas sorti le soir. Alors, le pot de départ à la retraite, il y a quelques jours, de Jean-Michel Larqué [commentateur sportif et ex-joueur de l'AS Saint-Etienne, son second club de coeur et ennemi atavique du premier, l'OL], ce n'était pas une contrainte sociale, c'était du plaisir." Plus qu'un plaisir, le vin est une passion pour Bernard Pivot qui a mis sa notoriété au service des crus du Beaujolais, en crise. Ici à Lyon en mars 2016. AFPPlaisir aussi, assure-t-il, le doute, ce petit pincement au coeur inévitable quand on prend un virage aussi serré, qu'on se met en danger - "relatif, je ne risque pas grand-chose..." - sur une scène de théâtre, en écrivant des livres après avoir passé à la question Albert Cohen ou Marguerite Yourcenar, en devenant une égérie des réseaux sociaux à 80 printemps. Plaisir enfin, les rires du public "Ils ont tellement plus de valeur à mes oreilles que les applaudissements. C'est l'une des dernières grandes joies de ma vie." Sur la scène du Lucernaire, à Paris, où il a campé une semaine, à la fin du mois de mai, ils ont une nouvelle fois retenti, peut-être moins souvent qu'en province, où l'on se fiche du qu'en-dira-t-on et de la bienséance et où l'on s'esclaffe plus fort. Sauf ce soir particulier où, pendant plus d'une heure, la salle a ondulé, emmenée par un groupe de rieurs qui réagissaient au quart de tour, au moindre jeu de mots. Ils, ou plutôt elles, sont venues le trouver à la fin du spectacle, se sont présentées, de vraies fans, assumées, organisées, "uniquement des femmes entre 30 et 40 ans", se remémore Bernard Pivot, l'oeil gourmand - "Plutôt 50", rectifie Guillaume Allary, qui y était. "Et vous savez comment elles se sont baptisées ? Les "pivettes". Claude François avait ses Claudettes, moi, j'ai mes Pivettes !" Il en rit encore. Episode 3 Où Bernard Pivot, devenu "geek", gazouille et joue les moralistes Sa nomination au Goncourt était un pétard agricole à l'aune de cette explosion-là le 26 décembre 2011, Bernard Pivot rédige, en moins de 140 caractères à l'époque, son premier tweet - où il juge "terrible de trouver sur les tombes des cimetières les chrysanthèmes pourris de la Toussaint"... Bernard Pivot sur Twitter, ce repaire de gamins mal élevés qui parlent un sabir incompréhensible, semé d'acronymes anglo-saxons, bien loin de la belle langue de Molière ? LOL ! Que vient-il faire dans cette galère, s'interrogent conjointement, un peu effarés, ses admirateurs et la twittosphère ? Vous savez, si vous avez lu le premier épisode de ce récit, que c'est moi qui ai transmis à mon beau-père les dix commandements de Twitter. Je refuse d'endosser une autre responsabilité que celle-là. Le reste, ce qu'il en a fait, sa régularité de métronome il poste tous les matins à la même heure, le nombre stratosphérique de ceux qui le suivent, l'impact de certains de ses aphorismes retweetés des dizaines de milliers de fois, c'est à lui, à lui seul et à son esprit qu'il le doit. Pivot fait de la gymnastique. Pierre Assouline fait partie de ses followers, et réciproquement. Il connaît bien Twitter, qu'il fréquente depuis quelques années et où il collectionne les suiveurs, en nombre bien moins important, certes, mais quand même. La reconversion numérique de Pivot ? Ça le "fait marrer". Somme toute, il ne la trouve pas si surprenante. "D'abord, c'est une excellente gymnastique, la concision. Et puis il y joue les moralistes, y diffuse des pensées à l'ancienne, mais adaptées à notre temps." Guillaume Allary va plus loin dans la référence à une tradition littéraire "qu'il remet au goût du jour, ce genre si français passé à la postérité avec La Rochefoucauld". A l'auteur des Maximes, dont il ne nie pas l'influence, Bernard Pivot ajoute le pamphlétaire Antoine de Rivarol, "un 'twitto' qui s'ignorait". Est-ce parce qu'il trouve chez eux, et sur Twitter, cette désinvolture qui le fascine tant chez les autres mais qu'il est "trop sérieux" pour cultiver chez lui ? Il répond "peut-être". Mais ajoute que l'exercice lui rappelle ses débuts au Figaro littéraire, où il fallait chercher en permanence l'information, rester en éveil. Que c'est sa manière aujourd'hui "d'être présent au monde", comme à l'époque. Pour tenir sa partition sur ce "réseau choral qui n'est composé que de solistes", contrairement à l'agrégateur Facebook, qui ne l'intéresse pas, il doit être plus que jamais journaliste. "Il achète la presse chaque jour, il lit tout L'Equipe, Le Figaro, Le Parisien, Le Monde, les 'news magazines'... en partie, désormais, parce que Twitter l'y contraint", apprécie sa fille. Ceux qui y officient régulièrement le savent, Twitter n'est pas qu'un réservoir de belles lettres. C'est aussi, entre autres aspects inavouables, une vitrine où s'exposent et s'affrontent les ego. Comme, toutes proportions gardées, sur les scènes des théâtres ou devant les caméras de la télévision. De là à suspecter Pivot d'avoir cédé aux sirènes du narcissisme de masse, il n'y a qu'un pas, que pourrait inciter à franchir l'attention sourcilleuse qu'il porte au nombre de ses abonnés... L'accusation fait bondir François Busnel, qui pour son brillant plaidoyer en appelle à Edmond Rostand "Ce besoin de lumière est moins un besoin d'exister à tout prix, un désir de célébrité, qu'une envie de 'jouer le match'. Bernard, c'est Cyrano et son panache, qui croit qu'il est dans l'ombre et qui illumine tout le monde. Sans lui, sans ses tweets, sans sa bouille, sans son rentre-dedans, on s'emmerde. Il nous réveille, il réveille l'époque. Là encore, c'est Cyrano 'Que dites-vous ?... C'est inutile ?... [...] / C'est bien plus beau lorsque c'est inutile ! [...] / - Je sais bien qu'à la fin vous me mettrez à bas ; / N'importe je me bats ! je me bats ! je me bats !' Oui, c'est inutile, sans doute, ces tweets de Pivot auxquels répondent des imbéciles. Mais c'est beau, de faire ça, à son âge." Episode 4 Où sa curiosité se confirme être une belle qualité Ceux qui connaissent Bernard Pivot savent qu'il ne serait pas le même sans elle. Anne-Marie Bourgnon était déjà sa collaboratrice du temps du Figaro Littéraire, dans les années 1960, elle l'a suivi à la télévision et ne l'a pas quitté après, continuant, depuis son petit bureau de la proche banlieue parisienne, d'envoyer ses chroniques au JDD, de planifier ses rendez-vous, ses déplacements, de surveiller ses comptes et ses contrats. Elle est plus organisée que lui, qui, selon sa fille, gère pourtant déjà "un emploi du temps millimétré." C'est dire. Après cinquante années passées à son côté, cette fidèle parmi les fidèles sait mieux que quiconque pourquoi Pivot était aussi certain, en mettant un terme à sa carrière de journaliste télé, que, comme il s'en réjouissait à l'époque, "une vie agréable [l]'attendait". "Quand moi j'allais au théâtre, lui passait ses soirées à lire. Il n'allait jamais au cinéma, au concert, ne voyageait pas. Tout ce qu'il s'est remis à faire quand il a arrêté Apostrophes." Pourquoi, alors, replonger aussi rapidement, revenir à cette boulimie d'activités qui, de sa première vie à la seconde, donne le même tournis ? "C'est de la gourmandise, de l'envie, l'envie de découvrir mille choses, corrige-t-elle en riant, comme entre presque chacune de ses phrases. Pas de la boulimie." Un Pivot augmenté. A l'envie, à la gourmandise, Guillaume Allary préfère un autre terme, aux ressorts presque identiques, mais tellement plus ample la curiosité. Et reçoit de l'assistance un soutien unanime. "C'est le mot qui le caractérise le mieux, abonde Pierre Assouline. L'historien Pierre Nora, avec qui Bernard Pivot a signé un livre d'entretien sur son Métier de lire*, le disait déjà il est l'interprète de la curiosité publique." "Il est intéressé par tout, le déborde par la droite Jean Solanet, truculent président en titre du Club des Cent. Il a une capacité d'étonnement inépuisable." François Busnel, pour qui c'est "sa marque de fabrique", l'associe à sa disponibilité, "qui fait que lorsque Jean-Michel Ribes l'appelle, il répond, que si Jean d'Ormesson le fout dehors, il rebondit ailleurs." Le patron d'Albin Michel, Richard Ducousset, qui le fréquente depuis longtemps et a édité nombre de ses livres, trouve que c'est elle qui, appliquée à son travail d'écriture, fait de lui un "Pivot augmenté". Augmenté ? Bernard Pivot n'est pas d'accord. Il trouve qu'il n'y a rien d'exceptionnel là-dedans, qu'il a "la curiosité normale de tout journaliste qui s'il n'est pas curieux n'est pas journaliste". Mais il admet que "ce qui explique [sa] longévité, c'est la longévité de [sa] curiosité". Et Anne-Marie Bourgnon, finalement ? Elle approuve aussi. Elle en fait même son "arme absolue contre la vieillesse". La vieillesse. Pour Bernard Pivot, "comme pour nous tous", tempère à juste titre François Busnel, c'est un sujet... sans en être un. "J'ai 83 ans, mais je continue comme s'il n'y avait pas de limite. La limite viendra de la santé et de la mort. Je fermerai les écoutilles, et puis voilà ! prévient-il, en bon stoïcien. En attendant, ce qui vous semble être de l'hyperactivité, c'est ce qui me maintient en forme. Je suis comme une batterie qui se recharge elle-même". Et ça suffit ? Pas tout à fait. "Sa vieillesse, il en parle depuis qu'il a 60 ans, répond sa fille. Aujourd'hui, il en guette chaque nouveau signe. Elle lui fait peur, il la combat." Depuis les décès récents de deux de ses meilleurs amis, Jean-Claude Lattès et l'éditeur Raymond Lévy, une figure de la Résistance, elle a pris un aspect plus menaçant. Alors bien sûr, il fait attention à lui, veille au bon fonctionnement de sa "carcasse". "Il fait un check-up tous les ans", le moque gentiment Paul Geoffray. Sans omettre toutefois de préciser que, pendant que son copain fait les 400 coups, lui-même "passe la moitié de [ses] journées dans un fauteuil"... L'éditeur Jean-Claude Lattès, l'un de ses meilleurs amis, aujourd'hui décédé, en 1977. AFPFrançois Busnel a une solution différente, en même temps qu'un début d'explication et un hommage à la lecture "Lire pendant quarante ans de sa vie, comme il l'a fait, apporte un regain d'énergie. Umberto Eco disait que celui qui ne lit pas n'a qu'une vie et que celui qui lit en a mille. Bernard a eu mille vies. A son âge, lesquelles rendre réelles ? Une vie d'artiste et de saltimbanque sur scène ? Pas mal. Le Goncourt ? Pas mal aussi. Un livre avec sa fille ? Un beau projet. Sa vitalité vient aussi de ce qu'il a lu énormément. Et qu'il s'est approprié tous ces livres". Plus prosaïque, ou plus sentimentale, Anne-Marie Bourgnon fait allusion, sans s'étendre, à une autre médecine "Il continue d'être amoureux, et ce n'est sûrement pas un hasard, c'est une volonté de bonheur". Voltaire le disait déjà "J'ai décidé d'être heureux, parce que c'est bon pour la santé." Quand on s'appelle Pivot, on n'échappe pas aux grands écrivains. Episode 5 Où sa popularité demeure inoxydable malgré le temps qui passe"Nous nous rendions à un festival, en train. A l'aller, il y avait ce couple, les deux devaient avoir autour de 70 ans. Au retour, c'était une jeune femme, 35 ans environ. Ils ont reconnu mon père, eux comme elle, et ça nous a marqués, lui et moi. A des heures d'intervalle et bien que très différents, eux devaient le connaître d'Apostrophes, elle de ses dictées, tous les trois ont eu la même réaction ils étaient heureux, très heureux, de rencontrer, non une célébrité, mais quelqu'un qu'ils aimaient vraiment, on le sentait." Des histoires comme celle-là, Cécile Pivot en a plein sa besace, vécues au quotidien, au restaurant, sur des aires d'autoroute ou, depuis qu'ils dédicacent ensemble leur livre commun, chez les libraires. Dix-sept ans après la fin de Bouillon de culture, il suffit de se promener avec lui quelques minutes dans la rue pour constater que Bernard Pivot est encore une star - pardon, une vedette. Sans reparler de ses spectateurs au théâtre ou du million d'assidus qui l'attendent chaque matin, à 8 heures tapantes, sur Twitter. Passeur pour tous et pour toujours. La raison de cette popularité qui ne se dément pas ? Pour sa fille, "c'est sa modestie, d'abord". Mais aussi cette forme de lucidité, sur lui-même et ses capacités, grâce à laquelle il n'a jamais fait que ce qu'il savait faire, refusant, il l'a souvent raconté, de devenir producteur, président de chaîne ou ministre. Séance de dédicaces, le 26 août 2007, à Chanceau-Près-Loches, lors de la douzième édition de la manifestation littéraire La Forêt des Livres. Une popularité toujours "Il n'a pas connu une seule affaire, n'a pas une seule casserole", s'étonne-t-elle presque. "Il n'y a pas une tache dans son parcours professionnel", insiste Pierre Assouline, qui loue tout autant son "absolue liberté". Pour un homme de télévision, président de jury littéraire de surcroît, le cas est rare. Jean-Luc Grandrie, son producteur, qui se doit de bien connaître son public par nécessité commerciale, a une théorie complémentaire si on l'aime, Bernard Pivot, c'est parce qu'il est aimable. Qu'il goûte "le contact avec les gens, qu'il prend le temps". Il se souvient de certaines séances de dédicaces, après le spectacle, "qui duraient plus longtemps que la pièce elle-même". Dernière hypothèse, celle de Guillaume Allary, qui estime logique que sa cote n'ait jamais baissé, puisque, selon lui, il fait depuis toujours le même métier de "passeur" - "Intermédiaire, c'est moins prétentieux", rectifie Bernard Pivot. "A Apostrophes, à Bouillon de culture, à Double Je, dans ses journaux et ses livres, sur scène et sur Twitter, en sélectionnant des romans pour le Goncourt, que fait-il d'autre ? Il passe. Il fait connaître des auteurs et des ouvrages à des lecteurs. C'est bien pour ça qu'il n'arrêtera jamais, je le lui ai dit. Etre un passeur, c'est comme être un éditeur, c'est sans fin." Sa lumière s'éteindra donc sur scène, comme celle de Molière avant lui, sans qu'il ait jamais dételé ? Bernard Pivot a une vision différente de ses derniers instants "Si je peux choisir, je préférerais mourir dans un fauteuil, un livre entre les mains." Pour dire une dernière fois merde à la mort et vive la vie. *Les livres de Pivot L'Amour en vogue Calmann-Lévy, 1959 ; Le Métier de lire avec Pierre Nora, Gallimard, 1990 ; Le Dictionnaire amoureux du vin Plon, 2006 ; Les Mots de ma vie Albin Michel, 2011 ; Oui, mais quelle est la question ? NiL Editions, 2012 ; Au secours ! Les mots m'ont mangé Allary Editions, 2016 ; La mémoire n'en fait qu'à sa tête Albin Michel, 2017 ; Lire ! avec Cécile Pivot, Flammarion, 2018. Eric Mettout Les plus lus OpinionsLa chronique de Vincent PonsVincent Pons, avec Boris ValléeLa chronique de Marion Van RenterghemPar Marion Van RenterghemLa chronique de Sylvain FortPar Sylvain FortLa chronique du Pr Gilles PialouxPar le Pr Gilles Pialoux
Bernard Pivot, qui a marqué les belles heures de la télévision française avec "Apostrophes", quitte l'Académie Goncourt, dont il était membre depuis quinze ans et président depuis cinq ans, a annoncé mardi sur Twitter l'assemblée du prix littéraire. le compte Twitter de Bernard Pivot "Pour retrouver un libre et plein usage de son temps, à 84 ans Bernard Pivot a décidé de se retirer de l'Académie Goncourt à partir du 31 décembre. Il en était membre depuis 15 ans, le président depuis 5 ans. Il en devient membre d'honneur", a annoncé l'Académie sur Twitter, quelques semaines après avoir récompensé le romancier Jean-Paul Dubois pour "Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon" L'Olivier.
Culture Réservé aux abonnés À l'heure où Bernard Pivot publie un livre sur l'amitié et quitte sa chronique du JDD », Pierre Boncenne rappelle le mépris social dont il fut l'objet. Bernard Pivot pose pour les photographes le 29 juin 2001 sur le plateau de la dernière édition de son émission Bouillon de culture ». © PIERRE-FRANCK COLOMBIER / AFP Il n'est pas de la paroisse » cette expression concise m'a toujours semblé la meilleure manière de répondre aux interrogations sur la place singulière occupée par Bernard Pivot dans la vie des livres. Peu importe ici notre connivence, la manière dont nous avons cheminé ensemble Lire, Apostrophes, Bouillon de culture et, au-delà, partagé tant de moments d'amitié cette affinité réciproque dont il parle si bien dans son dernier livre, Amis, chers amis. À partir de mon poste d'observation, je veux juste rappeler un état de fait le plus souvent oublié aujourd'hui, enfoui dans les dégâts provoqués par les furieuses diatribes à l'encontre du spectacle audiovisuel, coupable, comme chacun sait, d'assassinat de la littérature et de la toute une période, Bernard Pivot... Je m'abonne Tous les contenus du Point en illimité Vous lisez actuellement Quand Bernard Pivot était le coupable idéal 20 Commentaires Commenter Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point. Vous ne pouvez plus réagir aux articles suite à la soumission de contributions ne répondant pas à la charte de modération du Point.
... mais la vie continue - Grand Format C'est l'histoire d'un homme qui vient d'avoir 82 ans. Déjà ? Jadis, il était toujours pressé, il régnait sur le monde de la culture et il se sentait... Lire la suite 19,90 € Neuf Poche En stock 7,40 € Ebook Téléchargement immédiat 6,99 € Téléchargement immédiat 19,95 € Grand format En stock 19,90 € Livre audio Expédié sous 3 à 6 jours 21,90 € En stock en ligne Livré chez vous à partir du 30 août C'est l'histoire d'un homme qui vient d'avoir 82 ans. Déjà ? Jadis, il était toujours pressé, il régnait sur le monde de la culture et il se sentait invincible. Aujourd'hui, à la retraite, c'est plus calme les défaillances du corps, les anxiétés de l'âme, la peur de perdre ses vieux amis qui forment une bande de joyeux octogénaires. Une autre vie commence. Avec le plaisir de pouvoir enfin prendre son temps et le perdre. A travers ce narrateur qui lui ressemble comme deux gouttes de vieux bourgogne, Bernard Pivot raconte le grand âge à sa façon. Curiosité, lucidité, humour, c'est bien lui. Et c'est bien sa manière de proposer une petite leçon de gouvernance individuelle où chacun trouvera quelques recettes pour vieillir heureux. Date de parution 06/01/2021 Editeur ISBN 978-2-226-45132-3 EAN 9782226451323 Format Grand Format Présentation Broché Nb. de pages 221 pages Poids Kg Dimensions 15,0 cm × 22,0 cm × 2,1 cm Biographie de Bernard Pivot Bernard Pivot est journaliste, chroniqueur, animateur et créateur d'Apostrophes, de LIRE, des Dicos d'or, grand défenseur des mots et de la langue française, auteur, président du Goncourt jusqu'en 2019. Il a publié plusieurs livres aux éditions Albin Michel, dont Les mots de ma vie 2011 et La mémoire n'en fait qu'à sa tête 2017.
perfectionnés électroniques chimiques biologiques atomiques et à neutrons sur les charniers d’aujourd’hui et demain. » 12 juin, Jean Dieudonné est interviewé par Bernard Pivot à l’émission Apostrophes à XVIII]1. Mais dès à présent j’ai la conviction qu'une algèbre homotopique ou, dans une vision plus vaste, une algèbre topologique » telle que je l’envisage, ne pourra être développée avec toute l'ampleur qui lui appartient, sans lesdits fondements catégoriques. Il s’agit d'une théorie des grosses catégories que j'appelle à présent accessibles », et des parties accessibles de celles-ci, en reprenant complètement la théorie provisoire que je présente dans SGA 4 I 9 [2]. J’ai tissé un tapis de près de deux cents pages sur ce thème d’apparence anodine, et cela me fera plaisir de t’en présenter les grandes lignes, si cela t'intéresse. Il quitte les Aumettes, fait étape chez une amie à Carcassonne, et là, il brûle un grand nombre de manuscrits. Il fait venir son ancien élève Jean Malgoire, professeur à l’université de Montpellier, et lui confie cinq cartons intacts, contenant 25000 pages de notes et articles. L ’ermite de L asserre En août 1991, Grothendieck s’installe incognito à Lasserre, hameau de Haute-Ariège, dans le Couserans, près de Saint-Girons, non loin du Vernet où fut interné son père. Il donne à de rares proches la consigne de ne communiquer son adresse à personne ; la consigne sera respectée puisque le public n’apprendra le lieu de sa retraite qu’à sa mort. Le maire du village de 1983 à 1995, Daniel Fillola, découvre par hasard l’importance du nouvel arrivant en feuilletant Science et Vie. mène une vie d’ermite, et ne reçoit personne. Lasserre, vu de Clanet 553 m, dans le Couserans 1992. Mon ancien élève Alain Genestier ENS 1986 58 soutient une thèse en géométrie algébrique sous la direction de Gérard Laumon, intitulée Ramification du revêtement de Drinfeld ». Il publiera en 2007 un livre intitulé L’isomorphisme entre les tours de Lubin-Tate et de Drinfeld, avec Laurent Fargues et Vincent Lafforgue. Longtemps chercheur au CNRS, il est professeur des Universités à Nancy, où il a dirigé deux thèses, intitulées Compactifications de variétés de Siegel aux places de mauvaise réduction » en 2008, Le lemme fondamental métaplectique de Jacquet et Mao » en 2012. 58 Si je cite ici les parcours de quelques anciens élèves ayant croisé les idées de Grothendieck, c’est pour donner un vague aperçu de la postérité de ces idées. 29 novembre, mort de Jean Dieudonné à Paris. 1994. Après sept ans de recherches, le britannique Andrew Wiles démontre la conjecture de Taniyma-Shimura-Weil, qui implique le Grand théorème de Fermat. 1996. Claire Voisin construit un contre-exemple à la conjecture de Kodaira en dimension 4. En géométrie algébrique complexe, un accent est mis sur certaines variétés compactes munies d’une métrique particulière les variétés kälhériennes. Pour bien comprendre la topologie de ces objets, il est important de comparer ces variétés aux variétés dites projectives. En 1960, le mathématicien Kunihiro Kodaira a prouvé en s’appuyant sur sa classification des surfaces complexes qu’en dimension 2, toute surface kählerienne pouvait être déformée en une surface projective. Le tour de force de Claire Voisin fut de construire une variété kälherienne compacte en dimension 4 ou plus qui ne pouvait être obtenue par déformation d’une variété projective car elle n’a pas le même type d’homotopie et donc d'établir que le résultat de Kodaira n’était pas valable en toute dimension. Vladimir Voïevodski démontre la conjecture de John Williard Milnor 1970 Pour tout corps F de caractéristique différente de 2, la K-théorie de Milnor modulo 2 de F est isomorphe à sa cohomologie étale ou ce qui est équivalent, à la cohomologie de son groupe de Galois absolu, profini, à coefficients dans Z/2Z. » Grothendieck avait prévenu ses amis et connaissances la fin du monde aurait lieu en octobre 1996. Le moment venu, rien ! Il leur envoie un rectificatif annonçant la fin du Tout » pour 2015 ou 2016. 1997. En janvier, décrit heure par heure, minute par minute, une journée pendant laquelle il pense à se suicider. 1998. 28 avril, Pierre Cartier annonce la mort de Bourbaki, dans une interview à Libération. Jugement d’humeur ou canular, Bourbaki est toujours en activité en 2020. A la fin du tome 2 de son traité d’Analyse mathématique Springer, Roger Godement insère une longue postface intitulée Science, technologie, armement ». 6 août, mort d’André Weil à Princeton. 10 novembre, mort de Jean Leray, à La Baule. 2001. Parution de la correspondance Grothendieck-Serre, par la Société Mathématique de France. Alain Connes reçoit le prix Crafoord pour ses travaux en géométrie non commutative. 2002. 4 juillet, mort de Laurent Schwartz à Paris. Laurent Lafforgue, qui a fait une thèse de géométrie algébrique sous la direction de Gérard Laumon, et qui est professeur à l’IHES, reçoit la médaille Fields au 24ème congrès international des mathématiciens, pour avoir démontré une partie des conjectures de Langlands. Vladimir Voïevodski reçoit également la médaille Fields pour avoir développé la notion d’homotopie pour les variétés algébriques et pour avoir formulé la cohomologie motivique, permettant de démontrer de nombreuses conjectures, comme la conjecture de Milnor. 2003. Jean-Pierre Serre reçoit le prix Abel. 2006. En juin, mon ancien élève Lionel Dorat ENS Lyon 1998 soutient sa thèse de doctorat à l’Université Louis Pasteur de Strasbourg, sur les G-structures entières de représentations cristallines » sous la direction de Wintenberger, approfondissant la théorie de Fontaine et Laffaille sur l’équivalence de la catégorie tannakienne des représentations cristallines du groupe de Galois d’un corps local K, et de la catégorie des Φ-modules filtrés sur K admissibles. 2008. Le 2 juin, sur France Culture, Stéphane Déligeorges consacre l’émission Continent Sciences à Grothendieck, pour ses 80 ans, avec la participation de Michel Demazure, Denis Guedj et Laurent Lafforgue. 13 août, mort d’Henri Cartan à Paris, à 104 ans. 2010. Le 3 janvier, rédige un texte interdisant la publication de ses écrits. L’IHES, qui envisageait de rééditer ses travaux, stoppe net son projet. 24 avril, mort de Denis Guedj à Paris. Né à Sétif en 1940, il a compté en 1969 parmi les fondateurs, avec Claude Chevalley, du département de mathématiques du Centre universitaire de Vincennes, devenu l’université Paris VIII. Il y a enseigné l’histoire des sciences et l’épistémologie. Collaborateur de Libération de 1994 à 1997, il avait connu la célébrité en 1998 avec Le Théorème du Perroquet, en 2000 avec le Mètre du Monde, et en 2005 avec Zéro. Denis Guedj était un ami de Grothendieck. Hervé Nisic tourne un documentaire sur Grothendieck, L’espace d’un homme, Il est l’un des premiers journalistes à se lancer sur ses traces. J’ai entendu parler du personnage Grothendieck en 2008. Le sujet et la perspective d’éventuellement le rencontrer m’ont tout de suite passionné. » Son documentaire repose sur de nombreux témoignages. 2011. 23 mars, John Milnor prix Abel pour ses travaux en topologie, géométrie et algèbre. 30 avril, Daniel Quillen meurt à 70 ans à Gainesville, en Floride. En octobre, le mensuel GQ publie un article de Philippe Douroux, Alexandre Grothendieck, un voyage à la poursuite des choses évidentes », disponible en ligne. 2012. Luc Illusie reçoit la médaille Emile Picard pour ses travaux fondamentaux sur le complexe cotangent, la formule de Picard-Lefschetz, la théorie de Hodge et la géométrie logarithmique ». 2013. 12 avril, au Collège de France, Antoine Compagnon, professeur de littérature française, et Alain Connes, titulaire de la chaire d’analyse et de géométrie, établissent un parallèle entre A la recherche du temps perdu et Récoltes et Semailles. Intelligence proustienne et imagination mathématique ? Pierre Deligne reçoit le prix Abel. Michael Artin, professeur émérite au MIT reçoit le prix Wolf. 2014, A la fin septembre, finit par accepter la présence de ses enfants, qui l’accompagnent jusqu’au dernier jour. Il meurt le 13 novembre au matin, à l’hôpital Ariège Couserans de Saint-Girons, situé sur la commune de Saint-Lizier. La nouvelle fait le tour des rédactions du monde entier The New York Times, The Washington Post, The Guardian, The Independant, The Telegraph…. Libération lui consacre une page, sous la plume de Philippe Douroux Alexandre Grothendieck, ou la mort d’un génie qui voulait se faire oublier Alexandre Grothendieck est mort jeudi matin à l’hôpital de Saint-Girons Ariège, à l’âge de 86 ans. Un nom trop compliqué à mémoriser et une volonté maintes fois affirmée de s’effacer, d’effacer sa vie et son œuvre, font que cette mort aurait dû passer inaperçue. Mais l’homme est trop grand et le mathématicien trop important pour que cet effacement soit total. A Sivens, les zadistes n’ont sans doute jamais entendu parler de cet homme qui a ouvert une brèche politique, après avoir reconstruit les maths d’après Euclide. … Philippe Douroux Le Monde titre, sous la plume de Philippe Pajot et Stéphane Foucart Alexandre Grothendieck, le plus grand mathématicien du XXe siècle, est mort. Alexandre Grothendieck a bouleversé la façon de faire des mathématiques avec sa nouvelle vision de la géométrie.… L’Humanité titre, plus sobrement Alexandre Grothendieck, géant des mathématiques, est mort. Pierre Cartier déclare Il s’est retrouvé l’un des créateurs de la géométrie algébrique, avec des idées extrême-ment générales, et des méthodes qui n’auraient pas dû réussir, parce que, en gros, il était comme un aigle qui survole de très haut et qui plonge sur sa proie ». Le 16 novembre, Jean-Pierre Kahane 1926-2017 publie ce témoignage Grothendieck et MontpellierGrothendieck et MontpellierGrothendieck et MontpellierGrothendieck et Montpellier Comme tous les mathématiciens de ma génération j’ai le souvenir de Grothendieck aux congrès internationaux de Moscou 1966 et de Nice 1970 refusant d’aller à Moscou recevoir la médaille Fields, puis prenant Nice comme tribune pour son tournant écologiste. Mais j’ai des souvenirs personnels plus anciens. D’abord, un dîner chez Laurent et Marie-Hélène Schwartz. La conversation était tombée sur le problème de la synthèse spectrale tel que le formulait Schwartz, et elle s’en était bien vite détournée trop difficile pour moi, avait déclaré Grothendieck. Quelques années plus tard, il était résolu par Malliavin. Et surtout, j’ai le souvenir des copies d’examen de Grothendieck à Montpellier. En 1954, quand je suis arrivé à Montpellier, les mathématiques occupaient quelques salles du palais de l’université, au dessus de la rue de l’Université, dans le centre de la vieille ville. Le corps enseignant comprenait cinq personnes trois professeurs, Soula, Turrière et Couchet, et deux maîtres de conférence, Dives et moi. Pas d’assistant ni de chef de travaux. Soula, analyste, et Turrière, mécanicien, étaient de vieux messieurs charmants, Couchet, mécanicien, bien plus jeune, avait pris la succession d’Humbert, Dives avait été professeur titulaire à Clermont-Ferrand et rétrogradé comme collaborateur ; il fonctionnait en Mathématiques générales, pour mon profit puisque j’avais les meilleurs étudiants en MPC. La ville était délicieuse et assoupie. Les mathématiques avaient eu une bonne bibliothèque quand Denjoy était à Montpellier, au début du siècle ; elle n’était plus entretenue. On m’accueillait en trublion sympathique. Un jour, avec Soula et Turrière, la conversation était tombée sur Grothendieck, qu’ils avaient eu comme étudiant. Ils ont sorti pour moi ses copies d’examen de licence, et, d’un coup, mon respect pour eux a fait un bond en avant. Ces copies étaient illisibles. Un examinateur aurait pu refuser de les lire. Mais ces vieux messieurs, Soula d’abord je crois, avaient senti ce qui se cachait derrière Grothendieck, et il a passé ses examens. C’est ensuite que, licencié, il s’est rendu à Nancy. Quand il est revenu à Montpellier tout avait changé, sinon les paysages alentour. Nous n’en avons jamais parlé, mais derrière son retour il devait y avoir le souvenir des salles dominant la rue de l’Université, et une certaine reconnaissance pour les vieux messieurs charmants qui lui avaient ouvert les portes. » Jean-Pierre Kahane, 16 novembre 2014 avait confié en 1991 à son ancien élève Jean Malgoire 20000 pages déposées dans 5 cartons, entreposées à l’université de Montpellier. Mathieu Grothendieck fait venir à Lasserre le libraire parisien Jean-Bernard Gillot59, et lui confie les manuscrits de son graphomane de père, 3 cantines contenant 40000 pages soigneusement rangées dans 44 boîtes entoilées réalisées sur mesure, plus quelques bouteilles d’alcool de mûre et de poire. Ces écrits mathématiques, poétiques, philosophiques, mystiques, ont été explorés par Georges Malstiniotis, disciple du maître, mais sont loin d’être inventoriés. Ils sont actuellement entreposés dans un lieu tenu secret à Paris. Il serait bon qu’ils soient classés trésor national. 59 Jean-Bernard Gillot tient la Librairie Alain Brieux, 48 rue Jacob, 75006 Paris. Une vie en trois photos… 2015. Première publication de Récoltes et Semailles au Japon. Une traduction partielle en russe était parue en 2002. 14 novembre Alexandre Grothendieck, ou le silence du génie » Une vie, une oeuvre, France Culture, Perrine Kervran 2016. Le Canard enchaîné, 24 février 2016 En mars, Bourbaki publie les chapitres 1 à 4 de Topologie algébrique, chez Springer, premier volume du Traité publié depuis 1998. Andrew Wiles reçoit le prix Abel. 2 juin, Claire Voisin est élue titulaire de la chaire de Géométrie algébrique au Collège de France. Elle est la première mathématicienne à être élue. 21 juillet, mort de Roger Godement, à Villejuif. Godement était assez éloigné de Grothendieck sur le plan mathématique, mais il en était proche sur le plan politique. Ils partageaient la même détestation des mathématiques mercenaires, et ils étaient l’un et l’autre des imprécateurs au cœur fidèle ». Septembre La revue Pour la science consacre un excellent dossier à Alexandre Grothendieck, rédigé par Winfried Scharlau, Jean Malgoire et Leila Schneps. 3 novembre L’héritage d’Alexandre Grothendieck » La méthode scientifique, France Culture, Nicolas Martin.. Du 18 au 20 novembre, rencontres littéraires à Pau Les idéaux mènent le monde », Pierre Cartier et Jean Vallès. 2017. 10 mai, les archives mathématiques d’Alexandre Grothendieck sont accessibles sur le web, via le site de l’Université de Montpellier pages sur au total peuvent être consultées. Ce sont des documents consignés par le savant entre 1949 et 1991. 30 septembre, mort de Vladimir Voïevodski, à Princeton. 17 décembre Alexandre Grothendieck, un mathématicien qui prit la tangente » Les
pour bernard pivot il etait de culture